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Pourquoi on s’accroche à une étiquette ?


Aujourd’hui l’astrologie s’est énormément démocratisée sur les réseaux sociaux : de nombreux comptes – dépourvus de réelles compétences – diffusent des horoscopes et des descriptions de signe astro sans le moindre fondement. Ces comptes connaissent pourtant un certain succès puisque beaucoup s’y reconnaissent. Comment l’expliquer et en quoi cette reconnaissance peut être une grille de lecture pour comprendre la construction du vaginisme ?


Petit point théorique : le « je » et sa formation.

L’homme établit naturellement des catégories, des cases où il détermine la place de chaque individu mais également sa propre place (cf. la catégorisation). Groupe de genre, groupe racial, groupe religieux, on parvient toujours à se situer sur un l’échiquier humain en fonction de certains critères. Mais on peut également y être renvoyé par ceux avec lesquels on interagit. Le « je » est une identité en suspens que l’on désire inconsciemment rattacher à certaines idées fixes, en particulier des idées positives. Il s’agit pour l’égo de se rassurer, en déterminant une réponse claire à la question « qui suis-je ? ». Dans cet esprit-là, on retrouve les nombreux tests de personnalité qui tentent de déterminer si vous êtes plutôt quelqu’un tourné vers l’action, la réflexion, l’entraide… en bref ce qui fait que vous êtes, vous.


Horoscope, tests de personnalité, et effet Barnum.

Les pseudo-comptes d’astrologie sur Instagram, Twitter & co, s’inscrivent dans cette même logique de définition d’un individu en fonction d’un critère, en l’occurrence son signe lunaire. On s’identifie à ces descriptions du fait d’un effet, qu’on nomme l’effet Barnum ou Forer. C’est un biais cognitif qui pousse l’individu à se reconnaître dans une description vague de sa personnalité. L’individu accorde alors du crédit à celle-ci parce qu’on lui présente comme certaine. Concrètement ça consiste en quoi et comment on a pu le démontrer ? Forer a fait passer un test de personnalité à un groupe d’étudiants, et a ensuite donné le même résultat à chacun :


« Vous avez certes des points faibles dans votre personnalité, mais vous savez généralement les compenser (…) Vous préférez une certaine dose de changement et de variété, et devenez insatisfait si on vous entoure de restrictions et de limitations. Vous vous flattez d'être un esprit indépendant ; et vous n'acceptez l'opinion d'autrui que dûment démontrée. Vous avez trouvé qu'il était maladroit de se révéler trop facilement aux autres (…) »


Tous se sont reconnus dans ce paragraphe parce que la description qu’il formule est générale et méliorative. Ce procédé est le même avec les phrases du type « tel signe s’attache difficilement », « tel signe n’aime pas qu’on se moque de lui », il ne s’agit pas de dire des adjectifs propres à un groupe, mais d’énoncer des caractéristiques communes à tous, dans lesquelles chacun se sent bien.


S’enfermer dans une case.

Cet effet est le produit d’une volonté de se définir par rapport à quelque chose de supérieur. Le critère qui nous dépasse, permet d'expliquer aux autres mais aussi à soi, ce qui nous échappe dans notre propre comportement : il est une façon de nous déculpabiliser.


Ce besoin d’être compris, de rejoindre un groupe est présent chez tous.tes. Pour la femme vaginique, cette identité peut constituer celle de la femme fermée. Personnellement, on a déjà pu me nommer par le passé « la porte blindée » ou « la Vierge Marie ». Je me suis attachée à ces étiquettes que j’ai intériorisées jusqu’à les confondre avec ma personnalité. J’avais d’autant plus de raisons de le faire puisque j’étais mise en avant par la société : j’étais la fille bien, celle qui n’ouvre pas les cuisses. Et aller à l’encontre de cette identité-là, tenter de guérir, c’était renoncer à moi-même, à ce qui faisait de moi, moi.


« Je suis vaginique ? »

Quand il s’agit de vaginisme, plusieurs écoles existent.

Certaines femmes vaginiques se reconnaissent derrière un profil type de « femme vaginique » avec des critères communs : attention portée à l’autre, à l’image publique, désir d’être acceptée. Si ces traits sont vrais, ils ne sont pas exclusivement l’apanage des femmes vaginiques, et inversement, toutes ne s’y retrouvent pas. Établir un profil type, c’est prendre le risque de s’enfermer dans une identité rassurante. On s’affirme vaginique parce qu’on aime prendre part à un groupe, mais on limite ainsi notre capacité à le quitter.


Beaucoup d’autres femmes atteintes de vaginisme refusent l’appellation « vaginique » puisqu’elles y voient un enfermement – ce qu’on peut légitimement comprendre au vu de ce qui a été vu précédemment. Cependant mettre des mots sur soi, sur un état est nécessaire à toute prise de conscience. Ce n’est qu’une fois le problème clairement formulé qu’il peut être dépassé. De plus, il est nécessaire de se rappeler que le vaginisme n’est pas une identité, mais bien une facette de celle-ci, voire un infime détail. Et que chacun.e admet de nombreuses identités vouées à évoluer.


Il faut accepter, pour un temps, d’être une femme vaginique, pour régler le problème. Puis se défaire de cette facette de son identité pour laisser la place à d’autres particularités.




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