Témoignage : « Je suis croyante et pratiquante, et j’ai découvert récemment que je souffrais de vaginisme. J’ai beaucoup lu sur la responsabilité de la religion et de son dogme dans mon vaginisme. Loin de vouloir stigmatiser les femmes qui font le choix de guérir, j’ai l’impression que le processus est incompatible avec ma foi, qui place haut le respect de ma virginité. J’ai peur de consulter une praticienne qui considère mes intérêts religieux comme secondaires, et j’ai également peur du jugement d’une croyante si c’est vers elle que je me tourne. Quelle position adoptée ? »
Anonyme.
Le poids de la religion : un poids à relativiser.
Ce témoignage est intéressant parce qu’on pointe souvent et même quasiment tout le temps la religion comme seul facteur de vaginisme. On retrouve, en particulier dans les trois grandes religions monothéistes, l’invitation à rester vierge : et comme vous le savez, plus on répète quelque chose à quelqu’un, plus son corps l’intègre. La religion a donc été largement incriminée comme l’unique responsable du vaginisme et notamment la religion musulmane. C’est pour cette raison que lorsque l’on fait des recherches sur ce trouble, il est souvent perçu comme venant des pays musulmans où l’attente du mariage pour les relations sexuelles est encouragée. Dans les discours, on parvient vite à une diabolisation des croyances, peu importe la nature de ces croyances d’ailleurs.
Alors certes, la religion a sûrement un rôle à jouer dans la construction du vaginisme, et il faut pour guérir, réfléchir à son rapport avec elle, mais elle n’est pas la seule à entrer en compte. Les nombreuses femmes religieuses, pratiquantes qui ne souffrent pas de vaginisme montrent qu’il n’y a pas de déterminisme, et que le poids de la religion est à relativiser. Elle est simplement un facteur parmi d’autres facteurs, tous aussi importants. Dans une société patriarcale où l’infériorité des femmes est de mise, faire de la religion la seule responsable, c’est se donner bonne conscience.
Ce que disent les textes : Pas d’opposition mais un alignement.
Concernant la deuxième partie de ce témoignage, il est naturel de se poser la question d’une possible opposition entre guérison du vaginisme et religion. Le vaginisme c’est la fermeture aux relations sexuelles, ce à quoi invite la religion : en ce sens, guérir du vaginisme peut être perçu comme un pêché. Or, le vaginisme ce n’est pas uniquement se fermer aux relations sexuelles, c’est aussi éprouver des douleurs lors de consultations médicales ou lors d’insertion de tampons/cups. Pour son bien-être et non simplement pour accéder à une sexualité pénétrative, guérir du vaginisme est essentiel. Attendre d’être marié, c’est repousser l’échéance : la guérison prend un certain temps, autant s’y mettre au plus vite.
J’ai recherché dans les textes religieux de quoi pousser plus loin la réflexion, libre à toi de choisir ton interprétation, ce que je dis (surtout dans ce domaine) est loin d’être une vérité absolue. Que ce soit au sein du christianisme, du bouddhisme, de l’islam ou du judaïsme, la maladie occupe une place dans les récits. Dans la Bible, il est dit : « Bien-aimé, je souhaite que tu prospères à tout point de vue et sois en bonne santé, à l’image de ton âme. » (3 Jean 1.2). Au verset 15 du chapitre 4 du Dévarim, la Torah indique l’obligation de soigner son âme, ce que beaucoup interprètent comme une obligation à prendre en compte sa santé. De même, Sahih Al-Boukhari, dans Sahih Mouslim écrit « Il existe un remède pour chaque maladie et lorsque le remède est appliqué au malade, il est guéri par la permission de Dieu, le Tout-Puissant. » Enfin, dans l’enseignement bouddhiste, la maladie est vue comme une source d’enseignement, et elle provient toujours du psychique qui impacte ensuite le corps.
Ainsi, pour chaque religion, il n’y a pas de contradiction à guérir du vaginisme, mais au contraire une obligation, un devoir religieux de se maintenir en bonne santé – que ce soit du point de vue du corps autant que de l’esprit. En matière de religion, tu es l’unique personne capable de décider ce en quoi tu crois.
La virginité.
Enfin, et c’est ce point qui cristallise l’éventuelle contradiction : penser que la guérison du vaginisme peut impacter ta virginité est tout simplement faux. La virginité désigne le fait de ne jamais avoir eu de rapport sexuel, or ta tentative de guérison n’est pas un rapport sexuel. Il existe plusieurs formes de guérison et je reviendrais surement dessus dans un prochain article, mais brièvement : tu peux choisir une guérison que je dis médicale, c’est-à-dire sans masturbation, sans partenaire. Dans ce cas, c’est exactement comme si tu soignais un mal de gorge, simplement il vient d’un autre endroit. Se soigner de cette façon-là n’impactera pas ta foi et ce qu’elle te recommande de faire.
Si tu t’inquiètes pour ton hymen, pas d’inquiétude non plus, puisque le processus de guérison ne l’impactera pas. Il s’agira de muscler ton périnée, et de pouvoir reprendre le contrôle sur ton intimité, et pas de simplement « percer un passage » dans ton vagin.
Donc si on résume, guérir du vaginisme ce n’est pas trahir ses croyances religieuses. Tu peux guérir du vaginisme et rester vierge. Tu peux guérir du vaginisme et être parfaitement alignée avec Dieu. Alors n’hésite pas !
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